Retour Enquête d’IDEWE sur le technostress : en Belgique, 21,6 % des travailleurs ont un sentiment d’incertitude dû aux technologies
Enquête d’IDEWE sur le technostress : en Belgique, 21,6 % des travailleurs ont un sentiment d’incertitude dû aux technologies
La montée en puissance de l’intelligence artificielle et les autres évolutions technologiques vont grandement simplifier notre travail. Mais cette numérisation comporte aussi ses défis. IDEWE, le service externe pour la prévention et la protection au travail, a joint ses forces à celles de la KU Leuven pour interroger 1 027 travailleurs salariés et indépendants de Belgique sur leur ressenti face aux facteurs de stress technologique.
Enquête d’IDEWE sur le technostress : en Belgique, 21,6 % des travailleurs ont un sentiment d’incertitude dû aux technologies
- En collaboration avec la KU Leuven, le service de prévention a mené une enquête sur le stress au travail en lien avec les évolutions technologiques chez les travailleurs salariés et indépendants.
- La techno-incertitude (21,6 %), la techno-complexité (14,1 %) et la techno-surcharge (13,7 %) sont les principaux facteurs de technostress.
- Il existe un lien négatif clair entre les facteurs de technostress et des aspects tels que la satisfaction au travail, le bien-être et la performance.
La montée en puissance de l’intelligence artificielle et les autres évolutions technologiques vont grandement simplifier notre travail. Mais cette numérisation comporte aussi ses défis. IDEWE, le service externe pour la prévention et la protection au travail, a joint ses forces à celles de la KU Leuven pour interroger 1 027 travailleurs salariés et indépendants de Belgique sur leur ressenti face aux facteurs de stress technologique*.
Dans le cadre de l’enquête, 21,6 % des répondants ont déclaré avoir un sentiment d’incertitude lié à leur travail et à leur rôle en raison des changements technologiques fréquents (« incertitude technologique » ou « techno-incertitude»). Ils disent se sentir constamment obligés de se former à l’usage des nouvelles applications. Quelque 14,1 % perçoivent aussi une « techno-complexité » (le sentiment que les nouvelles technologies ont soudain rendu leur travail beaucoup plus difficile) et une proportion similaire (13,7 %) souffre d’une « techno-surcharge » (parce que les nouvelles technologies les obligent à travailler plus, plus vite et plus longtemps). Les répondants sont aussi 5,1 % à avoir le sentiment de devoir être joignables en permanence et de rester à tout moment connectés à leur travail (« techno-invasion »).
« Nous constatons que les technologies ne sont pas seulement un vecteur de progrès, mais qu’elles apportent aussi des difficultés qu’il faut gérer. Cela peut entraîner un malaise très important, en particulier lorsque les personnes subissent l’effet de plusieurs facteurs de technostress en même temps », explique Tinne Vander Elst, chercheuse chez IDEWE. « D’un autre côté, seuls 2,6 % des répondants craignent de perdre leur travail parce que les technologies peuvent désormais les remplacer pour certaines tâches. Avec la montée en puissance de l’intelligence artificielle, qui fait de plus en plus les gros titres dans les médias, il est cependant prévisible que ce pourcentage augmente : la “techno-insécurité” est certainement quelque chose qu’il va falloir surveiller à l’avenir. »
« Même les entreprises informatiques et les responsables de départements informatiques doivent être attentifs au technostress »
La techno-incertitude est surtout présente dans les environnements de bureau
L’enquête montre que le technostress varie selon l’âge : 20,8 % des personnes de plus de 55 ans perçoivent une techno-complexité, contre 3,7 % de celles entre 25 et 34 ans. Il existe également une différence claire sur le plan de la techno-incertitude (27,1 % chez les plus de 55 ans, contre 13,2 % chez les 35-44 ans). Un examen secteur par secteur permet de constater que les répondants ressentent davantage les changements technologiques (« techno-incertitude ») dans les environnements de bureau (35,5 %) que dans les soins (18,2 %) et dans l’enseignement (13,7 %). Une plus grande part des répondants font état d’un sentiment de techno-insécurité dans les autorités publiques (5,8 %) que dans le secteur des soins (1,0 %).
« Singulièrement, chez les répondants qui ont un diplôme et/ou une expérience professionnelle dans l’informatique, le niveau de technostress est le même que chez les autres travailleurs, sauf en ce qui concerne le facteur “techno-complexité”. Sachant que les technologies sont au cœur de leur travail ou de leur formation, on aurait pu s’attendre à ce que le technostress les touche moins. Cela dit, leur branche évolue de plus en plus vite, et l’intelligence artificielle pourrait menacer toute une série de métiers de l’informatique, notamment la programmation. Les employeurs de ce secteur et les responsables de départements informatiques doivent donc faire preuve de vigilance et suivre régulièrement le niveau de technostress chez leurs travailleurs », souligne Tinne Vander Elst.
« Nous constatons que les personnes ont une attitude plus positive à l’égard des technologies quand elles sont moins touchées par les facteurs de technostress »
L’impact sur la perception du travail et le bien-être
Le fait, pour les travailleurs, d’être fortement soumis à un ou plusieurs facteurs de technostress a un impact sur leur perception du travail. « D’une manière générale, notre étude montre une relation claire entre, d’une part, les facteurs de technostress et, d’autre part, des scores moins favorables pour la satisfaction au travail, l’épuisement émotionnel, l’engagement et la performance. Nous observons aussi que les travailleurs ont une attitude plus positive vis-à-vis de l’utilisation des technologies lorsqu’ils subissent moins de facteurs de stress », poursuit Tinne Vander Elst. « Il est donc essentiel que les employeurs aient conscience des défis liés aux évolutions numériques et qu’ils les maîtrisent au maximum. »
Ne laissez aucune chance au technostress
« Les entreprises doivent suivre les avancées technologiques, cela ne fait aucun doute. Les technologies peuvent rendre le travail plus qualitatif, plus efficace et plus agréable. Il faut juste éviter que les effets négatifs potentiels n’annulent les progrès. De nombreux aspects entrent en considération : en plus des cinq facteurs de technostress identifiés dans notre étude, les changements technologiques peuvent aussi mener à un isolement social lié à la diminution des interactions humaines, à la création d’environnements de travail impersonnels, à des questionnements sur le respect de la vie privée et de l’éthique, à un ralentissement du développement des compétences. Les technologies elles-mêmes peuvent aussi avoir des effets inverses à ceux recherchés. Le risque, par exemple, serait de leur accorder une confiance excessive et de finir par manquer d’esprit critique face à la production d’outils d’intelligence artificielle comme ChatGPT », prévient Lode Godderis, le CEO d’IDEWE.
« Il faut donc peser soigneusement les avantages et les inconvénients des nouvelles technologies avant de les implémenter », poursuit-il. « Si le bilan est positif, on peut alors prendre les mesures nécessaires, dans le cadre d’une approche de change management solide, pour limiter au mieux tous les effets négatifs possibles. Faites participer les travailleurs concernés à la prise des décisions en matière de technologies, mettez en place une bonne communication, et proposez des formations et d’autres dispositifs de soutien en suffisance. Nos recherches montrent qu’il existe une relation positive entre ces “ressources” et le bien-être et les performances des travailleurs. »
*Entre le 21 et le 28 mars 2023, IDEWE, le service externe pour la prévention et la protection au travail, a mené une enquête avec la KU Leuven auprès de 1 027 travailleurs salariés et indépendants sur des thèmes tels que les évolutions technologiques, les facteurs de technostress, le rapport aux technologies, le rôle de soutien du supérieur hiérarchique et de l’organisation, et le bien-être. L’échantillon était composé de travailleurs retenus après un data cleaning qui a permis d’exclure les doubles participations et les questionnaires mal remplis. Les répondants avaient un niveau de formation assez élevé, ce qui est typique des enquêtes en ligne. Il est donc question d’un échantillon non représentatif de la population active en Belgique.