La numérisation à dimension humaine : dossier technostress au travail – partie 3
« Différentes ressources aident à diminuer l’impact du technostress »
Après avoir identifié les principaux facteurs de technostress (partie 1) et les conséquences qu’ils peuvent engendrer sur le bien-être et les prestations de votre entreprise (partie 2), il est temps d’examiner les ressources que vous pouvez utiliser pour minimiser le technostress. Nous vous conseillons à ce sujet dans la troisième partie de notre dossier « La numérisation à dimension humaine ».
Les ressources sont des facteurs qui augmentent notre bien-être et peuvent également atténuer l’impact des aspects stressants du travail sur le bien-être. Elles sont donc nos outils pour réduire l’impact négatif des facteurs de technostress.
Tinne Vander Elst (chercheuse dans notre centre de recherche scientifique) énumère ci-dessous quatre ressources, à savoir les connaissances numériques, le leadership numérique, l’attitude proactive de l’organisation à l’égard de la technologie et la formation. Tinne les explique une par une et partage les principaux résultats de notre recherche.
Nous publierons également un livre blanc. Nous y présenterons des idées et des chiffres encore plus détaillés et approfondis sur ces ressources. Vous souhaitez rester informé ? Inscrivez-vous à notre bulletin d’information.
1. Connaissances numériques
Quelles sont-elles ?
Les connaissances numériques comprennent les compétences de vos travailleurs à employer les technologies numériques. Nombreux sont ceux qui pensent immédiatement aux compétences typiques (être capable de bien travailler avec), mais oublient les dimensions cognitives (avoir confiance et s’être familiarisé) et socio-émotionnelles (utilisation dans une équipe, serviabilité des collègues, etc.). Or, ces dimensions sont également très importantes pour promouvoir l’adoption de la technologie et l’utilisation avec celle-ci.
Que ressort-il de nos recherches sur la relation entre le technostress et les résultats en termes de bien-être et de performance ?
Les chiffres les plus parlants concernant l’estimation des connaissances des participants sont les suivants :
- 63 % déclarent avoir de « bonnes compétences en technologie numérique », mais seulement 50 % savent comment résoudre leurs propres problèmes techniques (dimension technique).
- 81 % ont confiance en leurs propres compétences en matière de recherche et d’évaluation sur le Web (dimension cognitive).
- Seuls 41 % obtiennent souvent l’aide de collègues pour des tâches professionnelles via des outils tels que Skype et Teams (dimension socio-émotionnelle).
Si l’on examine la relation entre ressource et résultat, notre étude montre que les participants possédant une culture numérique souffrent moins d’épuisement émotionnel qui découlerait du techostress.
Om preciezer te zijn: als de digitale geletterdheid hoog is, is er geen significant verschil in emotionele uitputting tussen laag- en hoogscoorders op techno-onzekerheid. Is de digitale geletterdheid laag, dan scoren de personen met veel techno-onzekerheid ook significant slechter op de outcome emotionele uitputting .
Pour être plus précis, si la culture numérique est élevée, il n’y a pas de différence significative en termes d’épuisement émotionnel entre les participants ayant obtenu un score faible ou élevé en matière de techno-incertitude. Si la culture numérique est faible, les personnes ayant un niveau élevé de techno-incertitude obtiennent également des résultats nettement moins bons en ce qui concerne l’épuisement émotionnel.
2. Leadership numérique
Qu’est-ce que c’est ?
La définition que nous utilisons à cet égard est la suivante : « la capacité des supérieurs hiérarchiques d’une organisation à créer une vision claire et significative du processus de numérisation ainsi que des stratégies pour y parvenir » (Larjovuori et al., 2016, p. 144). Il comprend à la fois « les attitudes, les compétences et les comportements nécessaires dans les environnements de travail numériques » et « une vision claire des processus de transformation numérique et les capacités d’utiliser et d’actualiser les stratégies numériques ».
Que resort-il de notre étude ?
Nos questions portaient principalement sur les compétences numériques du supérieur hiérarchique direct, et il est remarquable de constater que la confiance à cet égard est plutôt faible. Alors que 65 % des personnes interrogées déclarent que leur supérieur apprécie l’utilisation des outils numériques, ce pourcentage chute lorsqu’il s’agit de connaissances et de leadership efficaces dans ce domaine. Par exemple, seuls 43 % estiment que « le supérieur hiérarchique peut susciter de l’enthousiasme chez les autres pour le changement numérique » et qu’il « a une idée claire des structures et des processus nécessaires à cet effet ».
En ce qui concerne la relation entre ressource et résultat, nous constatons que les répondants qui déclarent bénéficier d’un bon leadership numérique obtiennent de meilleurs scores au résultat « Performance dans l’exécution des tâches », et ce, principalement en cas de techno-incertitude élevée. Par exemple, pour les personnes qui bénéficient d’un bon leadership numérique, le fait qu’elles soient confrontées à une techno-incertitude faible ou élevée ne semble pas avoir d’importance (voir le graphique). Il en va différemment lorsqu’elles obtiennent un score faible à modéré en matière de leadership numérique : si elles obtiennent simultanément un score élevé en matière de techno-incertitude, elles enregistrent des résultats moins bons pour la « Performance dans l’exécution des tâches ».
3. Démarche proactive de l’organisation en matière de technologie
Qu’est-ce que c’est ?
Si vous attendez de vos travailleurs qu’ils maîtrisent la technologie, il est logique que l’entreprise elle-même ait la capacité d’acquérir et d’appliquer des connaissances informatiques. Pour ce faire, l’organisation doit être consciente des tendances et des innovations et veiller à la qualité et à l’efficacité de sa technologie.
Vous faites ainsi des choix réfléchis et vous rayonnez de confiance, autant d’éléments qui stimulent la volonté et le processus d’adoption au sein de l’entreprise.
Que resort-il de notre étude ?
Pour toutes les affirmations relatives à la proactivité de l’organisation en matière de technologie (« reste à l’affût des innovations », « continue d’expérimenter », « dispose d’un climat favorable aux nouvelles façons d’utiliser la technologie » et « cherche toujours de nouvelles façons d’améliorer son efficacité »), plus de la moitié (entre 57 et 60 %) ont répondu « plutôt d’accord » ou « tout à fait d’accord ».
En ce qui concerne la relation entre ressource et résultat, il apparaît que les personnes qui déclarent travailler pour un employeur ayant une attitude proactive à l’égard de la technologie obtiennent de meilleurs résultats.
Les résultats de notre étude montrent un effet tampon de la proactivité organisationnelle à l’égard de la technologie dans la relation entre le technostress et divers résultats. En ce qui concerne la performance dans l’exécution des tâches, pour les personnes qui perçoivent la proactivité de l’employeur comme étant élevée, la différence entre les participants qui obtiennent des scores faibles et élevés en matière d’incertitude technologique n’est pas significative. Il en va différemment pour les personnes qui jugent cette proactivité faible à modérée : si elles obtiennent simultanément un score élevé en matière de techno-incertitude, elles font état d’une performance moindre dans l’exécution des tâches.
En outre, nous constatons que les personnes qui font face à une techno-complexité élevée affichent des attitudes moins positives à l’égard de l’utilisation de la technologie, et ce n’est pas sur ce point que l’attitude d’une organisation proactive à l’égard de la technologie semble pouvoir jouer un rôle important. Dans le cas d’une techno-complexité faible à modérée, les personnes appartenant à des organisations proactives ont des attitudes plus positives à l’égard de l’utilisation de la technologie. Des résultats similaires ont été obtenus pour la satisfaction au travail et l’engagement.
4. Formation
Qu’est-ce que c’est ?
Cette ressource n’a pas besoin d’être expliquée, alors regardons directement...
...ce qu’il ressort de notre étude.
Une personne sur trois a répondu par la negative quant à savoir si l’entreprise offre « la possibilité de suivre une formation pour améliorer ses propres compétences numériques ».
Veillez donc à vous interroger sur la réponse que donneraient vos travailleurs. En effet, dans notre enquête, les personnes qui ont eu l’occasion de bénéficier d’une formation numérique ont obtenu de meilleurs résultats. Les travailleurs à qui l’on a proposé une formation numérique affichent un épuisement émotionnel moindre, une attitude plus positive à l’égard de l’utilisation de la technologie et un engagement ainsi qu’une satisfaction accrus à l’égard de leur travail.
Par ailleurs, l’offre de formation semble jouer un rôle protecteur en ce qui concerne l’engagement, mais uniquement lorsque la techno-complexité est faible. Les personnes confrontées à une techno-complexité élevée semblent moins engagées et, dans ce cas, l’offre de formation ne semble pas pouvoir y changer grand-chose. Lorsque la techno-complexité est faible ou moyenne, les personnes à qui l’on a proposé une formation pour améliorer leurs compétences numériques semblent plus engagées que celles à qui l’on n’a pas proposé de formation.
Conclusion :
Bien que nous ne puissions pas généraliser notre recherche à l’ensemble de la population active belge, elle indique des tendances très similaires qui mènent toutes à la même conclusion : il est très important de maintenir les différents facteurs de stress technologique parmi les travailleurs à un niveau aussi bas que possible, car il existe une relation évidente avec divers résultats en termes de bien-être et d’expérience de travail.
Outre l’importance évidente des choix intelligents inhérents à la technologie elle-même (ne pas créer de surcharge, choisir la bonne technologie, etc.), les ressources décrites ci-dessus sont essentielles pour au moins atténuer l’impact du technostress.
* En collaboration avec la KU Leuven, IDEWE a interrogé 1 027 travailleurs salariés et indépendants sur des thèmes tels que les évolutions technologiques, les facteurs de technostress, le rapport aux technologies, le rôle de soutien du supérieur hiérarchique et de l’organisation, et le bien-être. L’échantillon était composé de travailleurs retenus après un data cleaning qui a permis d’exclure les doubles participations et les questionnaires mal remplis. Les répondants avaient un niveau de formation assez élevé, ce qui est typique des enquêtes en ligne. Il est donc question d’un échantillon non représentatif de la population active en Belgique.